En consultation gynécologique, il n’est pas rare d’entendre :
« Docteur, je souffre d’un fibrome. »
Et non simplement :
« Docteur, j’ai un fibrome. »
Cette nuance en dit long : le fibrome utérin (aussi appelé myome ou léiomyome) est fréquent… mais tous les fibromes ne posent pas problème. Faut-il alors les opérer systématiquement ? Voici quelques repères utiles.
Qu’est-ce qu’un fibrome utérin ?
Il s’agit d’une tumeur bénigne du muscle utérin, fréquente chez les femmes entre 30 et 50 ans. Leur apparition dépend de plusieurs facteurs, notamment l’âge et l’origine ethnique. Heureusement, la majorité des fibromes ne nécessitent ni traitement, ni intervention chirurgicale — une simple surveillance médicale suffit souvent.
Fibrome et fertilité : quand s’en préoccuper ?
Certains fibromes peuvent perturber la fertilité, d’autres non. Cependant, certains types de fibromes nécessitent une prise en charge spécifique, notamment s’ils sont :
- Intracavitaires ou proches de la cavité utérine, la déformant ;
- De grande taille (plus de 5 à 6 cm de diamètre) ;
- Très vascularisés ou présentant une vascularisation atypique, pour écarter un diagnostic plus grave, comme un sarcome (tumeur maligne) ;
- Douloureux en permanence, pendant les règles ou les rapports sexuels.
Parfois, les fibromes sont découverts lors d’un bilan d’infertilité, alors qu’ils ne provoquaient aucun symptôme auparavant.
Fibromes et grossesse : quelles précautions prendre ?
En cas de grossesse, les gros fibromes peuvent être responsables de :
- Contractions utérines précoces,
- Risque accru d’accouchement prématuré,
- Saignements anormaux au moment de l’accouchement.
Une évaluation avant la grossesse est donc primordiale, afin de mieux anticiper ces risques et d’envisager, si nécessaire, une prise en charge chirurgicale adaptée.
Fibrome et règles abondantes : un lien fréquent
Les fibromes sont parmi les principales causes des règles hémorragiques (ménorragies), soit trop longues, soit trop abondantes. Ils peuvent également provoquer :
- des douleurs menstruelles intenses (dysménorrhées),
- des douleurs pendant les rapports (dyspareunie),
- de la fatigue chronique due à une anémie (par baisse de l’hémoglobine et de la ferritine).
Les femmes un peu plus âgées ont souvent ce type de symptômes qui affectent leur qualité de vie.
Avant toute décision thérapeutique, il est essentiel d’éliminer d’autres pathologies comme l’endométriose ou l’adénomyose (pathologie de l’utérus ressemblant à l’endométriose), et de s’assurer de l’origine des symptômes.
Examens utiles :
- Frottis cervico-vaginal,
- Échographie pelvienne endovaginale (en première intention),
- IRM pelvienne si une opération est envisagée.
À noter : le scanner abdomino-perlvien est généralement inutile dans ce contexte.
Quelle chirurgie pour les fibromes ? Myomectomie ou hystérectomie ?
La myomectomie (ablation des fibromes en conservant l’utérus) est souvent privilégiée, notamment chez les femmes jeunes ou en désir de grossesse. Elle peut être réalisée par différentes voies :
- Hystéroscopie (par voie naturelle),
- Cœlioscopie (laparoscopie),
- Mini-laparotomie,
- Incision abdominale plus large, similaire à une césarienne, selon le cas.
Le médecin évaluera les meilleures façons de les enlever en préservant l’utérus, et le bilan établi orientera la discussion avec la patiente. Il est important de comprendre les implications de chaque option.
Dans certaines situations plus complexes, une hystérectomie (ablation de l’utérus) peut être discutée, notamment après la ménopause ou en l’absence de projet de grossesse.
Les suites et risques de la myomectomie
La myomectomie a pour but d’améliorer substantiellement la qualité de vie des patientes, notamment en ce qui concerne :
- Les douleurs et pesanteurs abdominales,
- Les saignements excessifs,
- La fertilité.
Les complications sont rares. La plus redoutée, mais peu fréquente (1 à 2 % des cas), est une rupture utérine pendant une grossesse ultérieure, généralement après 30 semaines d’aménorrhée. Elle nécessite alors une césarienne en urgence. Cette complication peut être prévenue grâce une réparation de qualité lors de l’intervention chirurgicale initiale.
En résumé
Tous les fibromes n’ont pas besoin d’être opérés. Mais lorsqu’ils entraînent des symptômes ou des complications potentielles (douleurs, troubles des règles, infertilité), une prise en charge médicale et chirurgicale peut être envisagée — toujours personnalisée, et discutée en fonction de votre âge, de vos souhaits, et du contexte clinique.
Il est important de consulter un·e spécialiste pour obtenir un avis éclairé. Et n’hésitez pas à demander un second avis, afin de confirmer le bon choix thérapeutique.
Pr Jean-Bernard Dubuisson
Chirurgien-Gynécologue FMH
Professeur honoraire, Faculté de médecine
Ancien Médecin-Chef de la Maternité des HUG